Le viol conjugal à l’épreuve de la justice

Avant de s’intéresser à la particularité du viol conjugal, il faut se poser la question de ce qu’est le viol au sens judiciaire.

Un viol c’est le fait d’obtenir de quelqu’un un rapport sexuel auquel il ou elle ne consent pas.

Juridiquement, un viol c’est « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, ou tout acte bucco-génital commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise »[1].

Le viol est donc une agression sexuelle qui implique de la même manière, la violence, la menace, la contrainte ou la surprise.

Il faut également qu’il y ait un acte de pénétration par ou dans un organe sexuel.

Exemple : Une pénétration vaginale ou anale (par un pénis, un doigt, un objet…), une fellation, un cunnilingus lorsque la langue est entrée à l’intérieur du vagin.

Le viol constitue le crime pour lequel il est prononcé le plus de condamnations en cour d’assises[2].

Il reste cependant extrêmement difficile pour une victime de prouver un viol, surtout quand il a lieu au sein de la sphère conjugale. Pourtant, sur les 18% de femmes violées qui osent porter plainte, un tiers de celles-ci ont subi un viol conjugal[3].

Historique de l’existence judiciaire du viol conjugal

Au cours de l’année 1990, la Cour de cassation reconnait l’existence du viol conjugal[4].

Au mois de novembre 1995, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) proscrit l’obligation du devoir conjugal et sanctionne le Royaume-Uni à ce sujet[5].

Le législateur entérine la notion de viol conjugal dans la loi française le 4 mars 2006[6] mais ce n’est qu’en 2010 que la référence à la présomption de consentement dans le couple disparait[7].

Pourtant, au cours de l’année 2019, la cour d’appel de Versailles a remis le devoir conjugal au goût du jour puisqu’elle a sanctionné une femme en prononçant un divorce à ses torts exclusifs pour « refus à des relations intimes avec son mari ». Le 18 mars 2021, la Cour de cassation est venue confirmer cette décision.

La plaignante a saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme avec l’aide de deux associations féministes afin de voir condamner la France[8].

Il est important de rappeler que le devoir conjugal n’existe pas dans la loi et qu’il ne s’agit que d’une interprétation par les juges de ce que constitue le devoir de fidélité bien inscrit quant à lui à l’article 212 du code civil.

Il est d’ailleurs désolant qu’une telle notion puisse coexister avec le crime qu’est le viol conjugal, si difficile par ailleurs à prouver pour les victimes…

La preuve judiciaire du viol conjugal

A la suite d’un viol, il est recommandé de faire pratiquer un examen médical avant de se laver pour recueillir des éléments de preuve (examen clinique, traces de violences, traumatisme psychologique…). Cela peut être pratiqué par un médecin de ville, par un médecin des urgences ou par le médecin des Unités médico-judiciaires.

Cependant, en dehors de blessures, la preuve de la réalité de la relation sexuelle avec l’agresseur·e ne permet pas de prouver un viol dans un couple. Il s’agira alors de la parole de l’un contre la parole de l’autre.

Les preuves matérielles qui peuvent être apportées sont les suivantes :

  • Attestations des proches auxquelles on s’est confié ou qui ont pu constater des choses à la suite des évènements (changement de comportement, marques sur le corps ou le visage etc.),
  • Attestations d’un médecin, d’un psychiatre et/ou d’un psychologue,
  • Messages à l’auteur·e des faits ou à des proches, en lien avec les faits,
  • Des photographies des éventuelles blessures.

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Vous pouvez me joindre sur lucie.rain@rain-avocat.com en joignant votre numéro de téléphone. Nous aurons alors la possibilité d’organiser un rendez-vous pour préparer et vous accompagner lors de votre dépôt de plainte.


[1] Article 222-23 du code pénal

[2] Sur 1646 crimes d’atteintes aux personnes condamnés par la cour d’assises, il s’agissait de 345 faits de faits de coups et de violences volontaires, 436 faits d’homicides volontaires et 797 faits de viols (Chiffres du Ministère de la Justice 2019)

[3] Chiffres publiés en 2019 par l’Observatoire National des Violences faites aux Femmes pour l’année 2018.

[4] Cour de cassation, 5 septembre 1990, N° de pourvoi : 90-83786

[5] CEDH, 22 NOVEMBRE 1995, S. W. C. ROYAUME-UNI, AFFAIRE NUMERO 20166/92

[6] Loi du 4 mars 2006

[7] Loi du 9 juillet 2010

[8] Collectif féministe contre le viol (CFCV) et la Fondation des femmes